Les usines en Chine populaire pendant la révolution culturelle
La
journée de travail d'un ouvrier en Chine populaire, un ouvrier de France raconte
—
Peux-tu nous expliquer un peu la vie d'un ouvrier dans l'usine ?
En Chine, on se lève
tôt. Dès 5h du matin, la ville s'anime. Mais les
ouvriers entrent à l'usine vers 8 h. Je dis bien vers 8 h, car
certains d'entre eux viennent plus tôt pour étudier des
innovations techniques par exemple. Ne pensez pas qu'ils y soient
contraints : la Chine est un pays socialiste ; on ne travaille pas
pour rempljr les poches d'un patron, on crée des richesses qui
profitent à tous.
—
Mais dis-nous, à ce régime-là, ils doivent faire
de sacrées journées!?
Oui, quelquefois, mais
croyez-moi, ils ont une conception du boulot vraiment différente
de la nôtre. Imaginez un peu ! le matin, ils se réunissent
pour élaborer avec le chef d'équipe le plan de
production de la journée.
—
Tiens, il y a des chefs ?
Les Chinois parlent
davantage de « cadres » et ils accordent une grande
importance à la différence. Vous allez comprendre
pourquoi. Si vous entrez dans une usine à un moment quelconque
de la journée, vous n'y verrez que des ouvriers, et bien malin
celui qui saura identifier « le chef » car tous bossent
et tous portent « le bleu ». Le cadre est surtout un
responsable élu et révocable par les ouvriers. Jamais
il n'est un garde-chiourme.
—
Et ils discutent de quoi précisément ?
De tous les problèmes
en relation avec la production et les conditions de travail. Ils
établissent notamment les cadences. Ils veillent à la
sécurité. Chacun expose non pas son problème,
mais le problème dont la solution est d'intérêt
général. Ils s'efforcent de promouvoir la production,
tout en améliorant les conditions de travail. Ils appliquent
au mieux, compte-tenu des problèmes propres à l'usine,
la pensée Mao-Tsé-Toung. Une partie du temps et de la
discussion est d'ailleurs consacrée son étude.
—
En quoi consiste l'étude de la pensée Mao-Tsé-Toung?
Vous avez certainement
entendu parler du petit livre rouge.
Dans ce livre sont
réunies les principales idées de la pensée
Mao-Tsé Toung, qui est un développement du
marxisme-léninisme. Et bien ils utilisent ce livre et
d'autres, pour résoudre de manière marxiste-léniniste
les problèmes qui se posent, pour avoir un style de travail
révolutionnaire.
Par exemple, à
Sian, dans une usine à imprimer les textiles, les ouvriers
chargés de la création des motifs décoratifs,
appliquent le principe marxiste-léniniste « servir le
peuple » en faisant des enquêtes régulières
auprès des paysans à la campagne et auprès des
clients dans les magasins afin de connaître leurs goûts.
—
Et après ça, ils travaillent ?
Ça, comme vous
dites, ce n'est pas un luxe inutile, mais un travail préliminaire
très important qui donne son sens à la journée
entière. Après ils s'installent à leurs
machines.
—
Ils bossent dur ?
Chaque fois que c'est
nécessaire, bien sûr. Toutefois les travaux pénibles
et dangereux sont plutôt confiés à des
volontaires. La production, même décidée en
commun a ses exigences. N'imaginez quand même pas de pauvres
types rivés à leur machine eu crispés à
leur poste de travail. (Il y a d'ailleurs peu de postes de travail
individuels ). Ils sont pleinement conscients que le fruit de leur
travail profitera à la collectivité, et non à
quelques uns. Ils fournissent les efforts nécessaires sans
aucune contrainte, exécutent leur tâche avec sérieux
et décontraction.
—
Ça leur arrive de discuter le coup, de s'arrêter un
moment ?
Oui, des pauses sont
prévues, au cours desquelles ils se détendent et
discutent. Le « règlement intérieur » n'est
pas rigoureusement établi, et il s'adapte à chaque
situation particulière. D'autre part, s'ils ont un problème
technique, ou s'ils ont une idée intéressante, ils
l'exposent aux camarades de travail ; éventuellement, ils
décideront ensemble de faire une pause pour examiner In
situation.
Pendant les heures de
travail, il leur arrive aussi de prendre en note leurs réflexions
sur le marxisme-léninisme.
—
Le règlement intérieur semble bien souple. Ne
donne-t-il pas lieu à des excès ?
Cela arrive évidemment.
C'est dans de telles situations, entre autres, que les cadres
exercent leurs pouvoirs, leurs responsabilités.
—
Ah ! Ce n'est pas ce que tu as expliqué tout à
l'heure...
Je développe : ils
n'engueulent pas sans autre forme de procès l'ouvrier qui
commet une faute professionnelle, qui abuse de la situation, ou qui
paresse. Ce serait nier ou ignorer le problème que d'agir
ainsi.
—
C'est-à-dire ?
En se référant
à l'oeuvre du président Mao : « De la juste
solution des contradictions au sein du peuple », ils cernent le
problème. Ils considèrent que le « coupable »
n'a pas affermi sa conception prolétarienne, et ils
s'efforcent de lui démontrer combien son travail, tout autant
que celui de ses camarades, est nécessaire à la
construction du socialisme.
—
C'est chouette les sanctions en Chine : on discute avec toi, et le
tour est joué !
Pas toujours les amis. Si
un type a l'esprit vraiment trop retors, ils le font travailler sous
la surveillance de l'équipe qui se charge de le rééduquer.
—
C'est moins drôle.
Je comprends votre
objection. Le rééduquer, ce n'est ni l'astreindre aux
travaux forcés, ni lui imposer des idées. Au contraire,
ses camarades de travail étudient avec lui les œuvres du
marxisme-léninisme et la pensée Mao-Tsé-Toung ;
par la discussion ils l'amènent progressivement à
prendre conscience de la valeur de son travail et de la nécessité
d'accomplir sa tâche avec courage et conscience.
—
Et les autres sanctions ?
La sanction la plus grave
est celle dont je viens de parler. Il n'y a jamais de licenciements.
—Et
les suppressions de primes
Le problème ne se
pose pas : depuis la révolution culturelle, les primes
n'existent plus.
—
Pourquoi ?
Avant la révolution
culturelle les prîmes existaient dans de nombreuses usines.
(Elles représentaient d'ailleurs un faible pourcentage du
salaire et allaient essentiellement aux ouvriers.) Mais ce système
incitait les travailleurs à ne rechercher que le bon salaire.
Les primes que les ouvriers révolutionnaires ont très
justement appelées « stimulants matériels »,
favorisaient l'individualisme et par conséquent l'égoïsme.
Elles suscitaient la division entre les travailleurs en donnant prise
aux rivalités. Pour gagner plus, on travaillait plus vite. La
qualité de la production en souffrait fréquemment.
—
D'accord. Tout ce que tu dis semble logique. Mais on a quand même
du mal à y croire.
Les Chinois n'ont pas
acquis ce haut degré de conscience politique du jour au
lendemain. Diverses étapes ont été nécessaires
e' il y aura d'autres étapes avant l'établissement de
leur grand idéal révolutionnaire : le communisme.
La prise du pouvoir le
1er Octobre 1949 et la Grande Révolution Culturelle
Prolétarienne ont été deux étapes. Les
révolutionnaires ont aidé les masses à
construire un monde nouveau, à lutter contre la conception «
bourgeoise » du monde. Ils ont propagé le
marxisme-léninisme, exhorté les masses à la
lutte de classes, et mis en avant les idéaux révolutionnaires
seuls capables de susciter l'enthousiasme de tout un peuple.
—
Que signifie "lutter contre la conception « bourgeoise »
du monde"?
C'est une question très
vaste. Pour l'essentiel, il s'agit de s'efforcer de « partir en
tout des intérêts du peuple », de « servir
le peuple », afin de ne pas se détacher des masses, de
comprendre et de faire siens leurs problèmes. Celui qui en est
capable acquiert ce que les Chinois appellent une « conception
prolétarienne du monde ». Les cadres notamment doivent
en être capables avant d'exercer leurs fonctions.
—
Est-ce qu'il suffit pour être cadre d'avoir réformé
sa conception du monde ?
Conformément au
principe « placer la politique au poste de commandement »,
c'est le critère principal. Les autres sont : s'appliquer dans
l'étude du marxisme-léninisme et de la pensée
Mao-Tsé-Toug, montrer de l'ardeur au travail et posséder
de sérieuses connaissances techniques.
—
Qui choisit les cadres ?
Les ouvrjcrs discutent
les candidatures puis les proposent a l'instance supérieure
que approuve. En cas de désaccord, on discute à
nouveau. La décision finale n'est jamais imposée.
—
Nous connaissons bien les chefs — pardon les cadres —
Maintenant parle nous un peu du patron.
Le patron tout comme le
contremaître sont passés au musée des horreurs.
Il n'y a même plus de directeur depuis la révolution
culturelle.
—
Formidable, explique vite.
De même que
l'ouvrier vétéran, fort de sa longue pratique, remplace
le « contremaître », c'est l'instance supérieure
dont je parlais tout à l'heure qui remplace le directeur. Elle
s'appelle comité révolutionnaire.
—
Quel est son rôle ?
Il est chargé de
la gestion de l'usine sous le contrôle politique des masses et
du Parti Communiste.
—
Comment est composé le comité révolutionnaire ?
Il y a trois catégories
de représentants, membres ou non du Parti Communiste : les
représentants des ouvriers, ceux des cadres et techniciens, et
aussi, dans certaines usines, ceux de l'Armée Populaire.
—
Comment sont élus ses membres ?
Le mode d'élection
est analogue à celui des cadres. Ici l'instance
supérieure'qui. approuve est le Comité du Parti. Ce
n'est qu'en cas de désaccord irréductible avec les
masses que, après discussion, la décision du Parti
prime.
—
Pourquoi y a-t-il des représentants de l'Armée ?
L'Armée Populaire
de Libération entraine la milice populaire dans l'usine en
dehors des heures de travail. Mais surtout les soldats de i'A.P.L.,
parce qu'ils sont choisis parmi les ouvriers et les paysans les plus
révolutionnaires, constituent fréquemment des équipes
de propagande de la pensée Mao-Tsé-Toung, tout en
travaillant à la production. Ils jouent donc un rôle
important, un rôle de soutien.
—
Et les syndicats ?
Avant la révolution
culturelle, qui a apporté dans ce domaine comme dans beaucoup
d'autres de profonds bouleversements, les syndicats s'occupaient
d'accroître la production et d'organiser les loisirs.
—
C'était pas mal, non ?
Pas si bien que ça,
car ils perdaient de vue les vrais problèmes liés aux
conditions de travail et au rôle de la production en pays
socialiste. C'était le risque d'un retour au capitalisme sous
une autre
forme.
—
Nous t'avons interrompu. Que font-ils maintenant ?
Ils sont devenus les
conseils ouvriers ou Assemblée générale des
ouvriers. Ils constituent le lien entre les ouvriers et le comité
révolutionnaire. Ils se chargent d'organiser l'étude
politique et les cours du soir, s'occupent des innovations techniques
et participent à la gestion de l'usine.
—
Parle-nous un peu des ouvriers, de leurs salaires, de leurs
conditions de vie et de travail.
Les salaires d'abord :
par mois un apprenti gagne de 30 à 40 yuans, un ouvrier
qualifié gagne 60 à 80 yuans, et un ouvrier vétéran
80 à 120 yuans. Aucun ouvrier en Chine n'est payé à
l'heure, à la pièce ou au boni. Comme je vous l'ai dit
tout à l'heure, les primes n'existent plus, sauf celles
accordées aux ouvriers qui accomplissent un travail pénible,
pour acheter un complément de nourriture. Ce n'est pas là
un stimulant matériel.
—
Quel pouvoir d'achat représentent ces salaires ?
Le mieux est de vous
donner des chiffres :
La nourriture coûte
de 10 à 15 yuans par personne et par mois.
Le loyer coûte de 2
à 5 yuans par mois.
L'eau et l'électricité
: moins de 1 yuan.
Il n'y a pas d'impôt
sur le revenu. Les prix, qui sont les mêmes pour toute la
Chine, sont stables ou même diminuent souvent.
—
Un ouvrier pourrait donc gagner toute sa vie le même salaire ?
Le socialisme permet
l'amélioration constante du niveau de vie du peuple, car il
n'y a pas de patron à engraisser. Il permet l'augmentation des
salaires ainsi que la progression du salaire de chacun, avec Page. Il
permet aussi la stabilité, voire la diminution des prix.
Cependant, aussi bizarre que ça puisse nous paraître, il
arrive qu'un ouvrier refuse une augmentation de salaire, parce qu'il
préfère que cet argent serve à l'édification
socialiste du pays plutôt qu'à améliorer son
niveau de vie.
—
Tu ne nous as pas dit qui décide de l'avancement, quels sont
les échelons ?
Vous avez raison, c'est
important. L'équipe des ouvriers au complet discute en
fonction des critères suivants : conscience politique, ardeur
au travail, ancienneté et niveau technique. La décision
est soumise à l'approbation du comité révolutionnaire.
En général les échelons de la qualification sont
au nombre de huit.
Dans l'une des usines que
j'ai visitée, ils sont les suivants : Le 8ème échelon,
le mieux payé, c'est l'ouvrier révolutionnaire qui a
participé aux guerres de libération (contre le Japon ou
contre Tchiang-Kai-Tchek en 49).
Le 7ème échelon,
c'est l'ouvrier vétéran, celui qui a travaillé
depuis très longtemps en usine.
Ensuite c'est le
technicien d'avant la révolution culturelle, celui qui n'a pas
assez transformé ses idées pour vouloir gagner le même
salaire qu'un ouvrier. Cette catégorie disparait peu à
peu. Le 5ème échelon, c'est les cadres révolutionnaires
d'avant la révolution culturelle.
Le 4ême, c'est les
ouvriers sortis des instituts techniques, et les cadres
révolutionnaires d'après la révolution
culturelle (ils ont décidé volontairement d'être
payés comme un ouvrier).
Le 3ème échelon,
c'est les ouvriers sertis des écoles secondaires.
Le 2ème, c'est les
apprentis de 2ème année, et le 1er, c'est les apprentis
de 1ère année.
Cette échelle
n'est qu'un exemple, car il n'y a pas de système unifié
depuis la Révolution Culturelle. En ce moment on discute ferme
en Chine pour fixer une échelle de salaires applicable dans
tout le pays. On se fixe pour objectif de réduire dans
l'avenir encore l'écart entre les bas et les hauts salaires,
et de diminuer le nombre des échelons.
—
Les cadres touchent-ils toujours moins que les vieux ouvriers ?
Oui, généralement
le salaire d'un cadre est inférieur à celui d'un
ouvrier vétéran. Au combinat sidérurgique de
Wouhan (60.000 ouvriers) le salaire moyen d'un cadre est de 110 yuans
— moins que le salaire des ouvriers vétérans de
l'usine — Toutefois, dans cette usine, quelques cadres chargés
des plus grosses responsabilités (ce qui représente une
lourde tâche pour une entreprise de cette taille) touchent
jusqu'à 180 yuans.
—
Maintenant que nous connaissons les conditions de travail des
ouvriers, parle nous de leurs rapports. Se connaissent-ils bien ?
Oui. D'abord l'étude
politique faite en commun, les discussions d'atelier pour fixer le
plan de production, la collaboration dans le travail permettent aux
ouvriers de bien se connaître et de s'en-traider.
Mais il faut ajouter à
cela les activités communes en dehors des heures de travail.
Les ouvriers de l'usine organisent souvent une partie de leurs
loisirs en commun : ils assistent à la représentation
d'une pièce ou d'un film, ou ils montent eux-même une
petite pièce de théâtre pour poser un problème,
pour susciter la discussion d'une question concrète.
Ils font aussi pas mal de
sport dans l'usine : ping-pong, gymnastique, basket, volley,
athlétisme ou même natation dans les usines qui
possèdent une piscine. Les matches de sport inter-usi-nes sont
très fréquents.
—
Les ouvriers chinois ont vraiment la belle vie !
Ne rêvez pas, le
tableau, vu sous notre optique, comporte quelques ombres. Vous allez
bondir quand je vous parlerai de leurs congés.
—
Nous comprenons qu'une société qui s'établit sur
des bases nouvelles rencontre de nombreuses difficultés.
Viens-en au fait.
Ils bénéficient
d'un jour de repos par semaine — qui n'est pas nécessairement
le dimanche —, ce qui fait qu'ils travaillent 48 heures par
semaine (6 fois 8 heures par jour). D'autre part il y a sept jours de
congés annuels qui correspondent à différentes
fêtes. Ce sont : la fête du printemps, le premier octobre
anniversaire de h fondation de la République Populaire de
Chine, le premier mai fête des travailleurs, le premier juillet
anniversaire de la fondation du Parti Communiste Chinois, le premier
août anniversaire de la fondation de l'Armée Populaire
de Libération.
—
C'est une plaisanterie sept jours !
Quelle réaction !
Comprenez qu'avant 49 le peuple chinois n'avait pas droit à un
seul jour de congé et subissait une exploitation féroce.
N'oubliez pas non plus que les Chinois consentent ce que nous
considérons être des « sacrifices ».
—
Quand même, si le socialisme ne permet pas des congés
décents !
Le but du socialisme ce
n'est pas seulement les vacances. Et par ailleurs, si sept jours par
an est la règle générale, il existe des
dérogations. Les travailleurs dont la famille habite loin
bénéficient de 21 jours de congés payés,
auxquels s'ajoute le temps du voyage (qui est payé par
l'entreprise). En cas de grande fatigue, l'ouvrier se voit octroyer
un congé supplémentaire au cours duquel il peut
séjourner en maison de repos. Enfin, s'il a des problèmes
personnels à régler, il bénéficie sur sa
demande de quelques jours de congé.
—
Pratique pour les fainéants !
Dans ce dernier cas,
l'équipe exerce un contrôle vigilant, encore que la
situation ne se présente pas souvent, vu la conscience
politique des travailleurs chinois.
—
Tu peux nous parler d'une autre jorme de congés : les
retraites ?
Tout d'abord il faut
préciser qu'en Chine, la retraite n'est pas le congé
définitif.
—
Quoi, ils bossent encore ?
En quelque sorte, oui.
Les retraités eux-mêmes disent que la retraite
idéologique n'existe pas. Ils estiment qu'ils doivent, dans la
mesure de leurs possibilités, toujours participer à la
vie de la société. Ainsi jouent-ils un rôle
important dans l'éducation des jeunes, ils aident à
leur formation technique, et à leur formation idéologique
en leur racontant les souffrances du passé.
—
Quel est Je montant de la retraite, et à quel âge la
perçoivent-ils ?
Ils touchent 70% de leur
salaire final. Les ouvriers modèles reçoivent
quelquefois un peu plus. La retraite est nationalement fixée à
60 ans pour les hommes et 55 ans pour les femmes. Elle intervient à
55 ans pour les hommes qui ont accompli un travail pénible et
50 ans pour toutes femmes qui ont travaillé manuellement. Elle
peut intervenir plus tard pour les ouvriers qui souhaitent contribuer
davantage à l'édification du socialisme, à
condition qu'ils soient en bonne santé.
—
Tu viens seulement de parler des ouvrières. Précise
leurs rôles, leurs droits.
En Chine, la femme est
l'égale de l'homme, de droit comme de fait. Elle est émancipée
au vrai sens du terme.
—
A travail égal, salaire égal, vraiment ?
Bien sûr, mais
l'émancipation ne se résume pas à cela. Elles
peuvent accéder à tous les emplois, les mêmes que
les hommes. Elles peuvent devenir cadre technique ou cadre politique.
—
Tu pourrais voir une femme souder ?
Pourquoi pas ? Néanmoins
on leur confie des travaux en rapport avec leurs capacités
physiques.
—
Qu'arrive-t-il quand une femme est enceinte ?
On lui procure un travail
compatible avec son état et le médecin de l'usine suit
l'évolution de sa grossesse. Le congé de maternité
varie de 56 à 72 jours si l'accouchement a particulièrement
éprouvé la maman.
—
Reprend-elle toujours son travail après ?
Généralement
oui, puiqu'elle peut laisser son bébé à la
crèche de l'usine jusqu'à l'âge de 18 mois.
—
Que lui en coûte-t-il ?
Peu, le lait, les frais
de crèche étant partiellement à la charge de
l'usine.
—Quels
avantages appréciables !
Il y en a un autre,
remarquable je crois : 2 demi-heures par jour, pendant son temps de
travail, la maman peut aller allaiter son bébé ou
simplement le voir.
—
Et après 18 mois ?
Elle confie son enfant
tous les matins au jardin d'enfants de la cité ouvrière
où elle demeure.
—
Reçoit-elle une aide supplémentaire à la
naissance ?
Quelquefois, mais ce
n'est pas une loi. Au combinat sidérurgique de Wouhan les
femmes touchent 1000 yuans en sept ans pour l'éducation des
enfants.
—
Une dernière question : que se passe-t-il en cas de maladie ?
Concernant les femmes ?
—
Non, tous les ouvriers.
L'accent est mis sur la
prévention des maladies. Dans l'usine existent une infirmerie,
quelquefois un dispensaire, avec sa salle de repos et sa pharmacie.
Le médecin examine au moins une fois par an tous les
travailleurs. Dans les ateliers, comme je l'ai vu à l'usine
textile de Changaï, un infirmier ou une infirmière passe
avec un chariot de médicaments pour les ouvriers légèrement
souffrants (mal à la tête par exemple). Ces infirmiers
sont souvent des ouvriers de l'usine qui ont suivi une formation
médicale de base. Enfin, à la cantine, on prévoit
des menus spéciaux pour les régimes.
—
Et si malgré cela l'ouvrier tombe malade ?
Les médicaments et
les frais d'hospitalisation sont gratuits. Pendant six mois il touche
son salaire intégral ; après quoi il reçoit 60%.
Si la maladie occasionne des difficultés à la famille,
celle-ci est secourue.
—
Et si un enfant tombe malade ?
La famille paie 50 % des
frais.
—
Ça peut faire cher ?
Non, les médicaments
sont très bon marché. D'autre part, pour des frais
importants, c'est la caisse de solidarité de l'usine qui paie.
—
Nous aurions bien d'autres questions à poser sur la vie dans
les usines. Nous aimerions savoir tout ce que tu as vu, entendu.
Soit ! Je vous invite à
lire l'article suivant, où vous trouverez les compte-rendus
détaillés et commentés des visites que nous
avons effectuées dans différentes usines. Les ouvriers
chinois apportent des témoignages intéressants, souvent
émouvants sur la vie dans les usines depuis avant 1949 jusqu'à
aujourd'hui.

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