Les usines en Chine populaire pendant la révolution culturelle

Les usines chinoises aujourd'hui : qui dirige?

 


Depuis 1949, ou un peu plus tard pour certaines usines.


Les usines ne sont plus propriété privée mais propriété d'Etat ; leurs bénéfices ne servent plus à enrichir une

poignée de capitalistes, ils profitent à tout le peuple et servent à édifier le pays. Mais le socialisme, ce n'est pas seulement « plus d'égalité » ou une répartition et une utilisation différente des richesses.

Dire qu'il n'y a plus de patron dans les usines chinoises, cela veut certes dire que personne ne s'emplit les poches avec la sueur des ouvriers. Mais cela veut surtout dire que l'usine est dirigée autrement. Ainsi, depuis 1949, la direction des usines est sous le contrôle du Parti Communiste.

Qu'est-ce que Je Parti Communiste Chinois ? Nous avions vu qu'avant la révolution, le Parti Communiste tirait les leçons des échecs ou des réussites dans des grèves — par exemple la grève des cheminots du 7 février 1923 — , il faisait le bilan des luttes de la classe ouvrière et des autres classes révolutionnaires.




Au Parti Communiste se trouvaient les ouvriers les plus conscients. ceux qui avaient le plus d'expérience de lutte ; ces ouvriers aidaient leurs camarades à créer des syndicats, à créer des cours pour l'étude culturelle et politique : on peut donc dire que Je Parti qui a pris le pouvoir en 1949, le Parti Communiste, était l 'avant-garde consciente de la classe ouvrière chinoise.

Ce rôle d'avant-garde consciente de la classe ouvrière, le Parti Communiste a continué à le jouer après la libération, une fois au pouvoir.

Lorsque les patrons ont perdu la direction des usines, il fallait que quelqu'un exerce les tâches de direction : l'Etat a nommé des directeurs dans les usines et ces directeurs ont travaillé sous le contrôle du Parti Communiste, afin que leurs actes aillent dans l'intérêt de la classe ouvrière.

Cela était-il suffisant ?

Nous avons vu dans le chapitre sur la révolution culturelle que non : un directeur ou des membres du Comité du Parti d'une usine peuvent, à cause de la place qu'ils occupent, se considérer supérieurs aux ouvriers, les mépriser, les opprimer. De tels dirigeants ont été critiqués pendant la révolution culturelle.


Le système actuel, les comités révolutionnaires, permet à la direction des usines d'être plus proche des ouvriers qu'avant la révolution culturelle.

Au lieu d'être nommés par l'Etat, les membres du comité révolutionnaire —sauf ceux d'entre eux qui sont militaires— sont élus par les travailleurs.

Parmi ceux-ci, la plus grande partie sont des ouvriers de l'usine (entre le tiers et la moitié des membres du Comité Révolutionnaire). Leur rôle est de faire connaître au comité révolutionnaire l'avis des travailleurs et de faire la liaison avec les masses pour la direction.


Une autre partie est composée de cadres et de techniciens. Enfin, une partie est composée de membres de l'armée ou de la milice de l'usine.

La présence de militaires dans la direction de certaines usines chinoises peut surprendre. En Chine, l'armée populaire est une armée différente des armées que nous connaissons : c'est une armée révolutionnaire, composée des meilleurs éléments de la classe ouvrière et de la paysannerie pauvre.


Les militaires membres des comités révolutionnaires sont donc les éléments les plus conscients des couches populaires. De plus, l'armée défend la révolution et Je socialisme : elle est le pilier du pouvoir d'état —la dictature du prolétariat—.

Pour résumer la place de chacun dans le comité révolutionnaire, on dit en Chine : « les représentants des masses sont la base, les cadres. sont l'ossature et l'année est le soutien. »

II y a des comités révolutionnaires dans chaque atelier, en plus du comité révolutionnaire de l'usine. Les candidats sont choisis démocratiquement : avant les élections, une large discussion est organisée dans l'usine ou dans les ateliers pour décider quels seraient les meilleurs candidats. Les listes sont ensuite présentées au comité révolutionnaire et au comité du Parti de l'échelon supérieur (par exemple arrondissement ou municipalité) qui les approuve et peut, s'il le juge nécessaire, s'opposer à certaines candidatures. Dans ce cas, il doit dire ses raisons et la candidature est rediscutée dans l'usine.

Enfin, les élus peuvent être révoqués. Si un cadre ne joue pas bien son rôle, les masses peuvent demander, après consultation de l'échelon supérieur, qu'il soit révoqué.

Comment fonctionnent les comités révolutionnaires ?

— l'administration est simplifiée, les cadres administratifs et techniques s'appuient sur les avis des travailleurs ;

Des exemples de ce fonctionnement nouveau, nous en avons eu beaucoup :



— à l'usine d'impression sur tissus de Tchentchéou : « autrefois certains camarades qui étaient responsables, et qui ont maintenant à nouveau des responsabilités après la révolution culturelle, prenaient les décisions tout seuls. Ils trouvaient les masses arriérées. Les masses n'avaient que le droit d'appliquer. Pendant la révolution culturelle, les masses ont critiqué ces camarades. Ils ont compris et aujourd'hui ils appliquent dans leur travail le principe : « compter sur les masses ».

— à l'usine de machines à coudre de Canton : « Dans le passé, les cadres étaient enfermés dans les bureaux, séparés des masses, maintenant, ils vont chaque semaine travailler clans les ateliers ; si, au cours de leur travail, ils notent des problèmes, ils en discutent immédiatement avec les travailleurs. Dans le passé, il y avait une multitude de bureaux. A l'heure actuelle, sous le comité révolutionnaire, il y a 4 groupes de travail. L'un est chargé de la politique, l'autre de l'idéologie, le troisième de l'administration et le quatrième de la production. Cela remplace les 30 bureaux du passé. »

— Le Parti dirige politiquement le Comité Révolutionnaire.

Dans une usine, les ouvriers et autres membres du personnel les plus conscients, les plus révolutionnaires appartiennent au Parti Communiste. Pour l'usine, la direction du Parti s'appelle « Comité du Parti » de l'usine. Le Parti assure que la direction du Comité Révolutionnaire est conforme à la politique de la classe ouvrière (s'appuyer sur les masses, servir le peuple.) Comment cette direction politique s'exerce-t-elle concrètement ? Voici les explications que nous avons eues à ce sujet à l'usine textile n°17 de Changhaï :

« Le comité révolutionnaire se trouve sous la direction du comité du Parti. Les grands problèmes sont discutés par le Comité du Parti. Ensuite, c'est au Comité Révolutionnaire de les mettre en pratique. Il dirige la production. Pour plus d'efficacité, chez nous, les responsables du Comité du Parti sont en même temps responsables du Comité Révolutionnaire. Dans les cellules, les dirigeants du Parti sont également dirigeants du Comité Révolutionnaire au même niveau : c'est la direction unique, surtout sur le plan idéologique.


Ceci demande aux responsables d'avoir l'esprit de Parti et de renforcer l'unité révolutionnaire. Sur le plan organisationnel, les deux organisations sont différentes, mais sur le plan de la direction, les deux comités travaillent ensemble. C'est également utile pour une administration simplifiée et efficace. »

« II y a des non-communistes au Comité Révolutionnaire. Au début, il y en avait beaucoup, maintenant ils sont moins nombreux. » (Certains ont en effet adhéré au Parti depuis leur élection au Comité Révolutionnaire) « Après avoir adhéré au Parti, de tels cadres ne se détachent pas de la production, ils ont des liens très étroits avec les masses et sont donc en mesure de les représenter. »

Comment éviter que les cadres ne se comportent en nouveaux bourgeois ?



D'abord, en essayant de bien les choisir.

Nous avons vu que les cadres étaient choisis après de longues discussions des ouvriers de chaque atelier. Dans ces conditions, on essaye de voir les qualités qui feraient du futur responsable un bon cadre révolutionnaire.

On peut se faire une idée de ces discussions par la réponse que nous avons eue dans une usine de moteurs à combustion de Pékin.

« Les cadres sont choisis suivant trois critères :

— leur application dans l'étude de la pensée Maotsétoung ; les cadres doivent en effet avoir un niveau idéologique assez haut.

— ils doivent avoir une bonne liaison avec les ouvriers

— ils doivent avoir de bonnes connaissances techniques et de l'ardeur dans le travail. »

Parmi ces trois critères, le premier est tout particulièrement important : un cadre a de grandes chances de se comporter en bourgeois s'il désire avoir des responsabilités par orgueil, pour gagner plus d'argent,.. . en un mot pour des raisons personnelles, égoïstes. Mais si pour lui, accepter des responsabilités, cela veut dire œuvrer pour le socialisme et mieux servir le peuple, il y a déjà une possibilité importante pour que ce cadre se comporte en révolutionnaire.


Cela suffit-il ?

Non, il y a même de nombreux exemples de cadres qui une fois à un poste de responsabilité, se reposent sur leurs lauriers et dégénèrent petit à petit.

Il y a aussi des exemples de cadres qui ont appliqué une ligne « ultra-gauche » : voulant brûler les étapes de la construction du socialisme, ils se sont coupés des larges masses de travailleurs.

C'est pour toutes ces raisons que les ouvriers ont le droit —et même le devoir !— de critiquer ces erreurs (et toutes les autres) chez les cadres. Ils le font souvent par voie d'affiches manuscrites placardées dans l'atelier ou à l'entrée de l'usine : ce procédé favorise la critique, car les affiches peuvent être lues par tous et discutées. Ainsi les critiques ne sont pas oubliées, mais discutées par tous et efficaces. Il faut noter que les critiques ne visent pas des personnes, mais le sens politique de leurs idées, de leur comportement ou de leurs actes.


Une autre mesure est prise pour que les cadres aient un bon style de travail : ne se séparer jamais de la production. Par exemple, à l'usine de moteurs à combustion de Pékin, tous les cadres participent au travail manuel pendant deux ou trois mois par an, ou bien travaillent plus de deux jours par semaine dans un a te-lier.


En Chine, les cadres travaillent à la production. Cela évite qu'ils ne se considèrent supérieurs ou différents des ouvriers. Cela leur permet d'être en contact avec tous les problèmes —petits ou gros— de la production.

Toutes ces mesures —aussi bonnes soient-elles— ne sont ni parfaites ni immuables. A l'étape actuelle, il n'existe aucune garantie que sous une forme ou sous une autre, les éléments bourgeois rie tentent de reprendre une partie du pouvoir.

Alors, comme l'a dit Mao Tsé toung, il faudra faire une nouvelle révolution culturelle et ceci non seulement une fois, mais à plusieurs reprises.


POURQUOI LE SYNDICAT A-T-IL ETE CRITIQUE ?

QU'EST-CE QUI LE REMPLACE ?

Pendant la Révolution Culturelle, le syndicat a été critiqué par les ouvriers chinois. Ils se sont rendu compte que non seulement i! ne jouait plus son rôle d'organisation de masse de la classe ouvrière, mais qu'il servait la contre-révolution, la restauration du capitalisme.

Le rôle du syndicat chinois avait-il été à 100% négatif ?

Non, évidemment. Il avait été créé dans un combat difficile contre les capitalistes et les impérialistes et avait dirigé de nombreuses luttes. Après la création de la République Populaire de Chine, le syndicat avait dirigé la lutte des ouvriers contre les capitalistes.

Mais, dans le syndicat chinois, il y avait aussi l'aspect négatif, c'est-à-dire la ligne qu'il appliquait.

Avant la Révolution Culturelle, le syndicat chinois avait deux tâches essentielles :

— le bien-être : c'est encore aujourd'hui une des tâches importantes des syndicats en Europe de l'Est. Le syndicat gérait les œuvres de bien-être des ouvriers : cantines, crèches, maisons de repos, associations sportives, excursions en car les jours de congé.. . Limiter le rôle du syndicat au bien-être, c'est évidemment détourner de ses tâches les plus fondamentales : gestion de l'usine, étude politique.. .

— La production : par exemple, le syndicat jouait un rôle important dans les mouvements pour atteindre les normes de travail qui permettaient d'obtenir des primes : le résultat était que pour obtenir la prime, les ouvriers, en produisant plus de pièces, négligeaient la qualité. Et surtout lors de la discussion pour les primes, des jalousies, des divisions naissaient entre les ouvriers. Ceux-ci disaient « discuter sur l'obtention des primes, c'est mauvais, cela développe les querelles ». En s'occupant de la lutte pour la production sans s'occuper des tâches politique} (savoir dans quel but et comment on doit produire), le syndicat arrivait à diviser les ouvriers, à affaiblir leur volonté de lutte.


Pendant la Révolution Culturelle, ces conceptions ont été critiquées :

Le syndicat ne se donnait pour tâche que l'économie, la production ou le bien-être, en ne voyant pas que tout cela dépend de l'orientation politique que l'on suit —capitaliste ou socialiste—.


C'est pour cela qu'aujourd'hui les tâches fondamentales de l'organisation qui remplace le syndicat sont l'étude politique —pour suivre consciemment la voie révolutionnaire— et la lutte de classe —pour combattre les conceptions bourgeoises—, afin que la production, la gestion de l'usine, les activités de bien-être soient réellement au service des ouvriers et du peuple.

Voici ce que nous ont dit des ouvriers de Changhaï, qui préparaient le congrès au niveau municipal de leur nouvelle organisation, au sujet de celle-ci :

« Nous avons créé un « congrès des ouvriers » pour remplacer le syndicat comme instrument de la lutte des classes et aussi comme un organisme de la liaison des larges masses des ouvriers avec le Parti. Il devrait devenir une école du communisme pour la classe ouvrière. »


Quel est le rôle du « congrès des ouvriers »? (c'est un ouvrier d'une usine de bracelets-montre qui nous l'explique.)

1 « la tâche principale du congrès des ouvriers est d'organiser les ouvriers dans l'étude des œuvres du Président Mao pour les armer de cette pensée.

2. il faut saisir la lutte de classes, donner des cours sur la lutte de classes. (Ceci se fait à partir d'exemples concrets : on essaye de saisir la lutte de classes qui se déroule dans l'usine.)

3. la grande critique. (C'est la critique des idées réactionnaires qui ont été appliquées dans l'usine ou, plus généralement, dans le pays.)

4. leçons pour se mettre à l'école de l'Armée Populaire de Libération et pour prendre exemple sur elle.

5. choisir, éduquer et former des cadres pour fournir des dirigeants à l'Etat dans certains domaines. On les forme avec une conscience politique élevée pour diriger et gérer certaines entreprises.

6. prêter attention aux mesures de sécurité dans les usines et à la vie matérielle des ouvriers ».

« Le congrès des ouvriers a également organisé pour les ouvriers des écoles du soir pour élever le niveau de conscience dans l'étude politique et technique. Ces cours ont lieu 3 jours par semaine le soir et pendant deux heures : culture, littérature et technique. »



Voici ce que nous ont dit de ces cours du soir les travailleurs de l'usine textile n°17 de Changhaï :

« Le rôle du congrès des travailleurs est de développer le mouvement d'étude et de vaste critique révolutionnaire ; il s'occupe de l'éducation pendant les heures de loisir : ici, 1500 ouvriers suivent les cours du soir (l'usine compte 8 350 ouvriers et employés).

« Plus de 90% des ouvriers font d'autre part dans leur atelier des études culturelles et politiques. Les cours du soir comprennent notamment dans notre usine textile : filage-tissage, électronique et rédaction.

« Certains jeunes sont chefs d'étude dans leur atelier : tout en recevant une éducation par la classe ouvrière, ces jeunes doivent aider les vieux ouvriers à élever leur niveau d'instruction pour qu'ils puissent étudier aussi la pensée-Maotsétoung. (Beaucoup de vieux ouvriers étaient illettrés)

« D'autres jeunes travailleurs sont professeurs dans les écoles du soir. Actuellement, nous transférons les cours du soir dans les ateliers mêmes. Les jeunes écrivent eux-mêmes des manuels et préparent leurs cours. »


« Le congrès des ouvriers s'occupe des activités culturelles et sportives : basket-bail, échecs, ping pong, etc.. .

« Enfin, le congrès des ouvriers a pour tâche d'organiser les ouvriers pour contrôler et surveiller la gestion de l'usine, et aussi pour participer à cette gestion. Ils doivent surveiller les responsables de l'usine pour qu'ils ne s'écartent pas des larges masses ouvrières. Contrôler aussi les comptes de l'usine, les dépenses de l'usine. »


LES INTELLECTUELS, LES TECHNICIENS DANS LES USINES

Aujourd'hui, dans une usine chinoise, il est très courant de rencontrer, parmi les ouvriers, des intellectuels qui travaillent.

Certains sont des lycéens ou des étudiants qui viennent là pendant un mois de vacances afin d'apprendre ce qu'est la production, et comment se déroule la lutte de classe dans une usine.

D'autres —la majorité en général— sont des jeunes qui ont terminé l'école secondaire et qui viennent à l'usine travailler avec les ouvriers. C'est parmi eux que seront choisis, après environ 2 ans de pratique, ceux que leurs qualités permettent d'envoyer à l'université.

D'autres enfin sont des travailleurs intellectuels —par exemple des enseignants— qui viennent à l'usine afin de transformer leur mentalité, de « se faire ré-éduquer », comme on dit en Chine.

A l'usine de moteurs à combustion de Pékin, en plus des quelques 7 000 ouvriers et employés, il y avait en août 1971 plus de 1000 intellectuels qui travaillaient dans l'usine.

On en trouvait dans un peu tous les ateliers, que ce soit aux machines outils ou la chaîne de montage ; les ouvriers de l'usine aident ces intellectuels qui ont peu l'habitude du travail manuel.


Quel rôle jouent ces intellectuels dans les usines ?

Ecoutons la réponse qui nous a été donnée à l'usine de moteurs : « Les intellectuels qui travaillent dans notre usine sont des diplômés d'avant la Révolution Culturelle qui, au cours du mouvement de « lutte, critique, réforme » sont venus dans l'usine trivailler avec les ouvriers. Avant, ils étaient séparés de la pratique des masses et de la production. C'est pour cela qu'ils sont venus dans les usines. La plupart des innovations techniques ont été réalisées par des groupes de « triple-union », c'est à dire des groupes composés de cadres, de techniciens et d'ouvriers. »

« Souvent les intellectuels qui travaillent dans une usine jouent

donc un rôle dans les innovations, en mettant à profit leurs connaissances pour améliorer la production et les conditions de travail.



LA TRIPLE-UNION

On rencontre quelquefois dans les ateliers des usines chinoises des groupes de techniciens, cadres et ouvriers, qui discutent accroupis autour de plans ou de simples croquis faits à la craie à même le sol.

Il s'agit de groupes de « Triple-Union » qui depuis la Révolution Culturelle, réalisent les innovations techniques et les projets dans les usines.


Alors qu'avant la Révolution Culturelle, les techniciens et les ingénieurs faisaient les projets dans les bureaux d'étude, ils participent aujourd'hui à ces groupes ayant les ouvriers comme ossature ; alors qu'avant les projets étaient souvent compliqués, chers et mal adaptés, aujourd'hui ils sont plus simples et économiques.


De plus, la participation directe des ouvriers aux innovations permet d'avoir des projets bien adaptés —car les ouvriers connaissent bien les problèmes concrets de la production —. Cela permet aussi d'avoir des projets qui améliorent les conditions de travail : en Chine, on dit souvent qu'un bon projet est un projet qui améliore les conditions de travail tout en accroissant la productivité.

On peut donc dire que la triple-union, en transformant les rapports de production (elle asssure la direction directe de la classe ouvrière sur la technique) a amené un nouveau bond en avant des forces productives : c'est ce que résume le mot d'ordre de la Révolution Culturelle : « Faire la révolution et promouvoir la production ».

Comment fonctionne dans la pratique la triple-union ?

Voici le récit que nous ont fait les travailleurs d'une usine chimique de Changhaï, au sujet d'une innovation concernant la lutte contre la pollution :

« Dans la fabrication de l'acide fluorhydrique se produisent des gaz résiduels et des scories ; un ingénieur a voulu résoudre ce problème avec une minorité de techniciens : enfermés dans le laboratoire, ils ont gaspillé en un an plus de 80.000 yuans.


Ils ont cherché à réaliser un traitement à sec, (absorption par la soude) mais ils ont endommagé l'équipement pour obtenir un produit bon à rien, sinon « tout juste bon à combler les fossés ».



Le problème n'avait pas été résolu par eux. Au cours de la Révolution Culturelle s'est créée une triple-union, avec les ouvriers comme ossature et des techniciens et des cadres. Les ouvriers ont une riche pratique car, tous les jours, ils sont au poste de production et connaissent les conditions de travail.


Les meilleures expérimentations sont donc celles auxquelles participent des ouvriers ayant de l'expérience pratique. Les ouvriers ont suggéré d'utiliser seulement de la chaux ; les expériences et les résultats ont été satisfaisants. Les technicien travaillaient avec les ouvriers, établissaient les plans avec eux ; les ingénieurs et les techniciens ont des connaissances théoriques, qui, alliées à la pratique des ouvriers, permettent des résultats rapides. En 10 jours, 33 plans de traitement des résidus ont été élaborés et se sont révélés assez efficaces.


Dans la triple-union, les cadres, par leur rôle politique, ont stimulé l'initiative des ouvriers et l'enthousiasme des techniciens.


En moins de deux mois, avec 10.000 yuans de l'Etat investis, nous avons réussi à traiter ces résidus préjudiciables à la santé et aux cultures et nous avons récupéré des produits très utiles. »

« La triple-union est donc une mesure très efficace pour unir la théorie et la pratique, les dirigeants et les masses. »


LES INNOVATIONS.

L'AMELIORATION DES CONDITIONS DE TRAVAIL

Dans les usines chinoises, il est courant de voir des machines réalisées par les ouvriers eux-mêmes, après discussion dans des groupes de triple-union.

Des exemples de telles réalisations, nous en avons vu de nombreux :

— à l'usine chimique visitée en 1971 à Changhaï : plusieurs équipements avaient été réalisés et conçus sur place ; parmi eux : une série de tours de traitement des résidus de la fabrication du sulfure de carbone. Les tours n'avaient pas toutes exactement la même hauteur ni la même forme : la raison en est que ces équipements ont été réalisés avec des pièces du rebut de l'usine. Le montage avait pris une semaine seulement. Ces tours de traitement au charbon actif permettent d'obtenir un liquide où il ne reste plus que 240 mg de sulfure de carbone par litre.

— dans une usine de camions à Changhai ; un système de ventilation à chaque poste de travail réaHsé principalement à l'aide de tuyaux de poêle et de ventilateurs. De nombreuses innovations réalisées sur les machines-outil, etc.. .

— à l'usine de moteurs à combustion de Pékin : depuis 1969, plus de 700 innovations techniques plus ou moins grandes ont été réalisées. Un exemple : le travail aux marteaux-pilons était difficile et peu productif, car non mécanisé ; il fallait tenir avec des tenailles, le fer incandescent. Au cours de la Révolution Culturelle, plusieurs innovations ont été réalisées dans cet atelier. Les pièces incandescentes sont maintenant amenées automatiquement de fours rotatifs nouveaux au marteau pilon, puis amenées de celui-ci aux machines suivantes sans intervention directe des ouvriers. Le travail est très allégée et la production meilleure — à tel point que les marteaux-pilons peuvent être arrêtés de temps en temps.

Mais ce travail reste dur : bruit, chaleur, quoique plus faible qu'auparavant, restent plus élevés que dans les autres ateliers : pour toutes ces raisons, les ouvriers de cet atelier sont des volontaires et leur bonne santé est vérifiée périodiquement. Cette innovation de l'atelier de marteaux-pilons représente bien ce que l'on cherche à faire en Chine : augmenter la productivité tout en améliorant les conditions de travail.


— à l'usine textile n°17 de Changhai :

1. l'air est conditionné dans tous les ateliers.

2. dans les ateliers de tissage, de nombreuses poussières de coton polluent l'air ; les ouvrières ont réalisé un rail qui serpente au-dessus de toutes les machines ; sur ce rail circule continuellement un


aspirateur qui débarrasse l'air des poussières nocives : les ouvriers arrivent donc, même sans grands moyens matériels, à améliorer considérablement les conditions de travail ; ceci n'est évidemment

possible que parce qu'il n'y a plus de patron ou de cadres bourgeois dans les usines pour les réprimer.

Voici ce que nous ont dit les travailleurs de cette usine au sujet des innovations :

« Du temps des japonais, il n'y avait que quatre ventilateurs et en été, il faisait 40° dans les ateliers : beaucoup d'ouvriers tombaient malades et néanmoins, le patron les forçait à travailler.

Nous avons développé un système de ventilation dans les ateliers.

(C'est ce que nous avons vu dans l'usine.)

« Avant, nous déchirions les balles de coton à la main pour les répartir entre les machines.

« Les ouvriers ont eux-mêmes conçu des machines pour se soustraire à ce travail pénible. Maintenant, il suffit d'appuyer sur un bouton au lieu de plus d'un millier de mouvements à la main qu'il fallait faire auparavant.

« Avant, beaucoup d'ouvriers avaient la tuberculose pulmonaire à cause de la poussière dans les ateliers. Maintenant, il n'y en a presque plus, grâce au triage du coton à la machine.

« Tout en élevant la production, il faut veiller à la sécurité des ouvriers.

« Dans chaque atelier, il existe une équipe de triple-union pour les innovations ; elle est composée de 3 parties : des ouvriers vétérans, des cadres révolutionnaires et des techniciens. Les techniciens ne se détachent pas de la pratique et du travail manuel. » (Dans cette usine, cadres et techniciens travaillent manuellement 1 à 2 jours par semaine, ou bien un mois entier par an.)

« Une fois par semaine, nous nous réunissons pour l'étude sur la recherche technique et les innovations.

« Si l'on s'en tient réellement à la ligne de masse, on obtient des succès. »

Ce large mouvement d'innovations techniques dans les usines chinoises — que ce soit pour augmenter la production ou améliorer les conditions de travail — ne repose sur aucun système de primes on de récompenses.

Si les ouvriers chinois consacrent des efforts à des innovations, si certains jours ils font des heures supplémentaires non payées pour y travailler, ce n'est pas pour des raisons individuelles ou égoïstes.


— c'est parce qu'il n'y a plus de patrons, plus de capitalistes à la tête des usines ; les ouvriers savent qu'ils ne travaillent pas pour engraisser des exploiteurs, mais qu'ils travaillent pour eux et pour tout le peuple.

— les ouvriers peuvent parler et développer leur initiative, car les conceptions des cadres soit disant révolutionnaires — mais bourgeois en réalité — qui prétendaient que les ouvriers n'ont pas à diriger la technique ont été combattues.


MOBILISER LES MASSES POUR SURMONTER LES DIFFICULTES. COMPTER SUR SES PROPRES FORCES.

Dans les écoles chinoises, on enseigne aux enfants que même un grain de riz coûte de la sueur aux travailleurs pour être produit, et que donc il faut éviter de gaspiller.

En effet, si des bourgeois gaspillent facilement le fruit du travail d'autrui, les travailleurs pratiquent l'économie et utilisent au mieux ce qu'ils ont produit.

Lorsqu'un problème se pose dans la production, les travailleurs chinois essayent toujours d'éviter les moyens complexes et coûteux : ils cherchent plutôt à faire appel à l'initiative des masses populaires et à résoudre le problème en « comptant sur ses propres forces. »

Un exemple significatif d'usine qui « compte sur ses propres forces » nous a été donné par l'usine d'engrais chimiques de Yenan. Cette usine, située dans une région montagneuse relativement pauvre, a été mise en service en août 1970 et produit des engrais pour les communes populaires du district : c'est donc une usine relativement petite (430 travailleurs).

L'usine a été édifiée à partir de 1968 par ses futurs ouvriers : une majorité d'anciens paysans de la région, 3 cadres et 12 jeunes intellectuels.

Voici comment ils ont résolu les différents problèmes de la construction, d'après le récit que nous en a fait un cadre du comité révolutionnaire :

« L'eau représentait un problème grave. L'usine nécessite plusieurs tonnes d'eau par jour et selon les documents que nous avons consulté, notre région manque d'eaux souterraines... Que faire ? Nous n'avons pas fait confiance aux documents, nous avons mobilisé les masses et fait des enquêtes auprès des paysans pour rechercher de l'eau dans la région. Cela nous a permis de creuser, avec des moyens rudimentaires, des puits qui ont fourni l'eau nécessaire. »


« Un autre problème fut celui de l'installation des machines ; le faire en comptant sur nos propres forces ou faire appel à l'extérieur?


C'était là un problème de ligne. Nous avons étudié à plusieurs reprises la pensée Maotsétoung sur le sujet « il faut compter sur ses propres forces ». Nous travaillons tous pour le même but, et ceux qui viendraient ici pour l'installation des machines manqueraient ailleurs. Nous avons donc pris la résolution de compter sur nos propre forces. Au bout de 2 mois, nous avions installé avant terme plus de 30 machines, ce qui permettait de démarrer la production».


« Avant de pouvoir faire fonctionner l'usine, il restait à résoudre le problème du réservoir à air comprimé. Il fallait enduire ce réservoir d'un liquide contre la rouille. Au départ, il était prévu que 4 ouvriers feraient ce travail. Mais nous nous sommes rendus compte que le liquide utilisé provoquait des boursouflures de la peau et qu'il faudrait un mois pour faire ce travail à quatre. Or, selon le processus de construction, il était impossible de consacrer plus de 8 jours à ce travail.


Les ouvriers ont discuté de ce problème et ont décidé de participer tous à la peinture du réservoir, ce qui réduisait

au minimum les risques, chacun n'étant en contact avec le liquide qu'un court espace de temps. Le travail a ainsi été terminé à temps, mais soixante-dix personnes avaient contracté de légères boursouflures de la peau que les équipes médicales purent rapidement guérir. »



POUR MIEUX SERVIR LE PEUPLE :

LES USINES COOPERENT ET LES OUVRIERS FONT DES ENQUETES.

Souvent les ouvriers chinois nous ont parlé des échanges d'idées ou d'expériences qu'ils avaient eu avec des ouvriers d'autres usines.

Cette pratique est très courante en Chine, que ce soit par des rencontres entre ouvriers de 2 ou plusieurs usines travaillant dans la même branche, ou par des stages, pendant lesquels les ouvriers d'une usine moins avancée viennent apprendre auprès des ouvriers d'usines plus en avance, en travaillant avec eux quelques semaines.

Si de telles rencontres entre ouvriers sont possibles, c'est qu'il n'y a en Chine ni concurrence, ni secrets de fabrication. Toutes les usines travaillent dans le même but — le socialisme — et n'ont donc rien à cacher : au contraire, elles coopèrent pour mieux servir le peuple.

Des exemples de cette « coopération socialiste », on peut en avoir de nombreux lors d'un voyage en Chine.

— pour créer une nouvelle usine : pour aider à la construction et à la mise en service d'une usine chimique que nous avions visitée à Changhaï, une centaine d'usines — en particulier une usine chimique proche — avaient envoyé des ouvriers expérimentés.

— Pour aider des ménagères à créer un atelier de quartier : iI est courant que des ménagères d'une même rue ou d'un pâté de maisons se groupent pour participer elles aussi à la production et être ainsi « l'égal de l'homme ». Seulement, elles n'ont en général jamais travaillé, et manquent totalement d'expérience de la production : c'était le cas des anciennes ménagères que nous avons vu

dans le petit atelier qu'elles venaient de créer dans leur quartier à Changhai ; elles y faisaient du montage de transformateurs, avec des pièces fournies par une grosse usine. Avant de démarrer cette

production, elles avaient fait 3 mois de stage dans la grosse usine, pour s'initie- à ce travail.

Pour lutter contre la pollution : les usines chimiques de Kirin rejetaient des gaz nocifs, des eaux usées et des liquides résiduaires en grande quantité. Ceci nuisait à la santé du peuple et à l'environnement. Une centaine d'usines de quartier ont été mises sur pied pour utiliser ces déchets et les transformer en produits utiles. Plus de 200 produits différents sont ainsi réalisés à partir de ces déchets.


— Pour échanger des expériences : à Changhai, des rencontres sont organisées entre usines pour échanger des expériences sur la récupération des déchets et la lutte contre la pollution. De tels échanges entre usines identiques peuvent porter sur les sujet les plus divers (nouveaux procédés, sécurité.. . )


— Pour mieux servir le peuple : des ouvriers et techniciens d'une usine vont souvent enquêter parmi les ouvriers qui utilisent ce qu'ils produisent, afin de connaître leurs besoins et de produire ce qui leur convient le mieux ; deux exemples notés dans des usines en Août 1971 : dans une usine de camions de Changhai, les ouvriers avaient enquêté auprès des ouvriers des chantiers qui utilisaient leurs camions-benne ; ils se sont rendus compte qu'après le travail, ceux-ci revenaient dans la benne, vu qu'ils ne pouvaient tous monter dans la cabine qui n'avait que deux places.


Pour mieux se mettre au service des ouvriers des chantiers, les ouvriers de l'usine de camions ont alors décidé d'agrandir la cabine, qui est maintenant plus longue et comprend 6 places ; avec ces nouveaux camions, tous les ouvriers peuvent faire les trajets à l'abri et être assis sur des sièges confortables.



ON NE PRODUIT PAS POUR LE PROFIT MAIS POUR ETRE UTILE AUX TRAVAILLEURS.

Si la coopération entre usines est possible, c'est que la production n'est pas commandée par le profit ou la concurrence, mais obéit au principe de « servir le peuple ».

C'est en étudiant et appliquant ce principe — et les autres principes du marxisme, du léninisme et de la pensée Maotsétoung — que les ouvriers chinois arrivent à transformer la vieille économie léguée par l'ancienne société, qu'ils arrivent à ce que par exemple les usines ne cherchent plus le profit mais cherchent à produire ce qui correspond le mieux aux désirs des travailleurs, ce qui est le plus économique, ce qui est de bonne qualité et durable, solide.

Un exemple d'usine qui produit pour servir les travailleurs et non pour le profit, c'est celui d'une fabrique d'imperméables en nylon utilisés par les paysans. Plusieurs ouvriers de l'usine sont envoyés par leurs camarades travailler quelques jours avec les paysans pour savoir si les imperméables sont pratiques et leur rendent service.


Or, ils se rendent compte que dans les rizières, le bas de l'imperméable traîne dans la boue ; ils décident donc d'ajouter une boutonnière pour le porter relevé. D'autre part, ils renforcent l'imperméable aux épaules pour freiner l'usure, car les paysans portent souvent des charges.

Un deuxième exemple : à l'usine d'impression sur tissus de Sian, les dessinateurs et graveurs de rouleaux d'impression vont enquêter parmi les ouvriers et paysans pour décider des nouveaux modèles de tissus : ils leur proposent des dessins de nouveaux tissus, ils leur demandent leurs suggestions, aussi bien sur les coloris que sur les dessins et la qualité des tissus.

Nous avons eu lors du voyage en Chine de l'été 1971 un autre exemple d'usine ne produisant pas pour le profit : c'est la petite usine- d'engrais chimiques de Yenan, dont nous avons déjà raconté la construction.


Voici ce que nous a dit le responsable du Comité Révolutionnaire de l'usine au sujet de la question de la rentabilité : « Nous avons encore des insuffisances. Le prix de revient des engrais de l'usine est notamment plus élevé que celui d'autres usines.


Mais pour soutenir l'agriculture, nous vendons les engrais au prix fixé par l'Etat. Pour l'instant, c'est l'Etat-qui couvre le déficit, mais nous étudions la question de baisser les prix de revient. »


Les travailleurs de cette usine veulent combler le déficit eux-mêmes et le plus tôt possible : l'utilisation intégrale permet d'améliorer les prix de revient et pour utiliser les sous-produits de la fabrication, les ouvriers font déjà des briques avec des poudres réfractaires : « il n'est rien qui soit sans valeur. Nous utilisons tout, mais nous étudions encore pour trouver les moyens de faire une récupération plus grande. »

Le but de cette usine n'est donc pas d'être rentable selon les normes capitalistes, mais d'être utile en soutenant l'agriculture dans la région.

On peut donc dire que dans la Chine d'aujourd'hui, il y a évaluation politique des besoins (ici -nécessité de développer l'industrie locale pour soutenir l'agriculture) et non production de ce qui rapporte le plus de profits ; en termes marxistes, on dirait : « la valeur d'usage (utilité pour le peuple) prime sur la valeur d'échange (valeur en monnaie, commerciale.) voici ce que dit à ce sujet un article de « Pékin Informations » n°5 de 1972 (« éliminer les déchets en les revalorisant ») :

« L'entreprise socialiste est différente de l'entreprise capitaliste, et sa nature lui interdit de ne considérer que l'aspect économique sans envisager l'aspect politique, que les intérêts de sa propre unité .'ans considérer les besoins de l'ensemble.


Pour juger si une chose est% rentable ou non, il faut partir des intérêts de l'ensemble. Une chose qui n'est pas rentable pour une entreprise peut l'être pour l'ensemble. Ceci dans l'esprit révolutionnaire de tout faire ce qui est profitable pour le peuple. »




LA PLANIFICATION : FAVORISER L'INITIATIVE LOCALE

DANS LE CADRE DU PLAN CENTRAL

Dans la Chine d'aujourd'hui, la recherche du profit n'est plus la force mot- - de la croissance des entreprises ; de même la concurrence — et avec elle les faillites qui laissaient au chômage chaque année des milliers de travailleurs — ont disparu.

La production et la croissance des entreprises sont déterminées par un plan central d'Etat qui permet l'initiative à la base. Comment cela est-il possible ?

D'abord, l'administration a été considérablement allégée et simplifiée pendant la Révolution Culturelle : ainsi à Changhaï, le personnel administratif est passé de 60 000 à 10 000 employés. Pour pouvoir réaliser une telle simplification des structures et une telle décentralisation des décisions, il fallait que chaque unité ait la volonté de travailler dans un but commun.

Cette unité de toutes les entreprises, de tous les travailleurs, elle ce fait avant tout sur le plan politique : pour prendre des décisions les travailleurs chinois se basent sur l'étude de la même ligne politique révolutionnaire, ils étudient les mêmes textes du marxisme, du léninisme et de la pensée Mao-Tsé-Toung.


Pour le plan, ce n'est pas l'Etat qui fixe à chaque usine sa production pour l'année suivante ; les propositions de plan viennent au contraire de la base, des travailleurs qui dans chaque atelier discutent du bilan de la production de l'année en cours et des possibilités pour l'année suivante, des productions que l'on pourrait développer ou créer.

Mais toutes ces propositions ne sont pas faites n'importe comment : elles sont faites en appliquant les principes et directives politiques généraux, qui sont transmis au Comité Révolutionnaire d aux travailleurs de l'usine par le Comité du Parti Communiste. L'unité du plan se fait par les directives politiques ; en Chine, on résume ceci par le principe selon lequel, c'est la politique qui commande l'économie

Tout ceci peut paraitre difficile à comprendre ; prenons un exemple concret :


En Chine, la tendance générale est vers le développement harmonieux des différentes régions ; c'est une application du principe politique selon lequel chaque province doit, pour l'essentiel, « compter sur ses propres forces ».


Dans le passé, la province du Liaoling, spécialisée dans l'industrie lourde, importait d'autres provinces ses biens de consommation ; aujourd'hui, elle produit la majorité des biens que sa population consomme ; en particulier, elle se suffit en céréales. C'est le résultat de l'application dans le plan de développement de l'économie de cette région du principe : «compter sur ses propres forces.»


A l'opposé, 9 provinces du Sud de la Chine, riches au point de vue agricole, ne produisaient pas de charbon. Aujourd'hui, on recherche et on exploite les gisements de la région, même s'ils sont de petite ou moyenne taille. Ceci a donné une impulsion à l'industrie métallurgique et mécanique de toute cette région

Le fait, pour les provinces, de « compter sur leurs propres forces » permet d'économiser les transports : chaque province n'a besoin que du complément venant d'autres provinces ou de l'étranger.

La décentralisation du plan en Chine se fait aussi d'une autre manière :

— un plan quinquennal et des plans à encore plus long terme (par exemple le plan national pour le développement de l'agriculture) fixent des objectifs généraux et des productions à atteindre

—- un plan national est préparé chaque année ; sont planifiés les grands produits (grands biens d'équipement, grands produits de base de la consommation, matières premières importantes).

  • puis, il y a des plans provinciaux plus détaillés


— et enfin des plans de district, en ville, de municipalité.

La préparation de tous ces plans se fait en « 3 montées et 2 descentes ». Chaque entreprise, d'après les orientations générales et les directives politiques, fait le bilan de la production de l'année, des innovations qui peuvent être faites, puis elle fait des propositions pour l'année suivante : tout ceci se fait sur la base des discussions qui ont lieu dans tous les ateliers sur ce sujet : les possibilités de production, les normes et cadences de travail pour l'année suivante, tout cela vient des propositions des travailleurs, tout cela est décidé collectivement dans les ateliers.

Cette proposition de plan remonte à l'échelon supérieur qui examine s'il y a cohérence avec le développement d'ensemble souhaité, qui fait des modifications et des propositions précises ( par exemple : utiliser les forces disponibles dans telle usine pour développer telle production nouvelle ) suivant les besoins.


L'usine examine alors ce projet de plan, qui est discuté dans chaque atelier ; elle le corrige (par exemple en disant qu'elle n'a pas les moyens de démarrer la nouvelle production proposée, ou au contraire qu'elle veut en faire plus).


Ce plan corrigé est centralisé, puis, sur cette base, le plan définitif redescend. Tout ceci donne donc lieu à beaucoup de discussions dans l'usine, et préparer un plan met en tout environ six mois. Et partout ce système donne l'initiative première à l'usine, aux travailleurs.